SAUBANHA

 

Située à l'est de Vic-en-Bigorre, cette acquisition donna bien du souci aux édiles vicquois durant trente et un ans (1494-1525). Rappelons brièvement ce que représente Saubanha pour la communauté vicquoise : 340 ha de terre à froment, de bois et de pâturages. Aujourd'hui encore, ce quartier des bords de l'Adour possède la terre de culture la plus riche de la commune.

Au milieu du XIe siècle, les vicomtes de Montaner sont plus puissants que les derniers comtes de Bigorre qui se sont succédés : Garcie-Arnaut, Bernard-Roger et Bernard II. Leur influence militaire couvre une aire géographique délimitée par l'Adour, à l'est, une ligne reliant Pujo à Pontacq, au sud, un axe Maubecq, Escures, Conchez, à l'ouest, et un front avancé allant de Conchez à Saint-Lanne, en vicomté de Rivière-Basse, au nord. Les deux foyers de cette influence se situent au château de Montaner et à l'abbaye Saint-Orens de Larreule dont les premiers abbés sont issus de la famille vicomtale de Montaner. Cette montée en puissance de la famille de Montaner durant tout le XIe siècle, suppléant en quelque sorte à la carence comtale, l'oblige à parsemer son territoire de mottes, de forts, de tours afin de protéger ses possessions des visées expansionnistes de deux proches et dangereux voisins : Armagnac et Béarn.

 

Les principaux ouvrages défensifs sont le château de Montaner avant sa reconstruction par Gaston Fébus, en 1375, deux petits châteaux à Pontiacq et Casteyde-Doat, des fortifications à Maure, Maubecq, Lalonquère, etc. juchées sur des éminences de terre de hauteur variable - jusqu'à 12 m - connues sous l'appellation de mottes du Montanarès.

 

Nous pensons que jusqu'au mariage de Talèze, vicomtesse de Montaner, en 1087, avec Gaston IV de Béarn, dit le Croisé, qui fit tomber la vicomté dans le giron béarnais, le château de Saubanha est un point défensif, à l'est, aux portes des comtés d'Astarac et du Pardiac. Deux siècles plus tard, en 1256, après le partage du comté de Bigorre entre Esquivat de Chabannes et Gaston VII, l'importance du château de Saubanha ne nous est pas connue mais les dimensions de la motte sont respectables.

 

En 1250, Jeanne de Saubanha épouse Aranud-Guilhan d'Anoye, petit village béarnais, non loin de Vic-en-Bigorre. Sicard de Saubanha, leur fille, présidera aux destinées de la seigneurie à la fin de XIIIe siècle.

 

C'est par la donation des terres d'Artigues à l'abbaye de la Casedieu que l'on connait l'existence d'une paroisse Saint-Germé d'Artigues, au lieu des métairies de l'Adour, à l'est du fleuve, et de Saint-Germé de Silhac qui probablement lui succéda. Ces deux paroisses n'ont déjà plus d'existence à cette époque là.

 

Pour les détracteurs du Moyen Age, époque "d'obscurantisme", il est plaisant de constater, à l’entour de l'année 1300, la présence de quatre femmes seigneurs autour de Vic-en-Bigorre : Narbonne de Baulat (Baloc), Miramonde de Fitole (Lafitole), Raymonde de Gensac (Gensac) et Sicard de Saubanha. Le XIIIe siècle, très justement qualifié de deuxième Renaissance, est une période de prospérité économique et sociale, de richesse spirituelle et intellectuelle intense. Les femmes règnent sur Saubanha jusqu'au milieu du XVe siècle. La plus célèbre est sans conteste Jaquette des Angles qui épouse tour à tour deux puissantes familles du comté, les Bazillac et les Castelnau. A sa mort, les tenants de la coutume des vallées de montagne (2e mariage avec Garcie-Arnaut de Castelnau), où la succession s'exerce par droit de primogéniture, affrontent les tenants des coutumes de la plaine (ler mariage avec Bernard de Bazillac). Pour les premiers, les filles n'héritent jamais quand il y a des enfants mâles. Cette confrontation sur l'application de la loi salique entraine des graves dissensions. La petite seigneurie n'y résiste pas; abandonnée par ses châtelains, elle n'est plus qu'un riche terroir en proie aux convoitises de 400 acquéreurs qui signent l'acte déclarant la nécessité d'une transaction d'achat.

 

Le 6 avril 1506, le commissaire Bérenger de Bonnefoi, représentant le Parlement de Toulouse, met en possession de Saubanha les consuls de Vic-en-Bigorre en leur faisant monter et descendre la motte où est assis le château, puis il leur remet l'ordonnance et les arrêts pour exécution. Après cette investiture symbolique, les Consuls sont dans l'impossibilité d'apposer sur l'ordonnance le sceau aux armes de la ville, ils l'ont perdu !