LA DIEUZEIDE

 

C'est une décision de Charles IX, en 1557, qui impose le temporel du clergé, biens meubles et immeubles jusqu'à concurrence de 3 millions 200000 livres tournois, dont 13637 livres tournois pour le diocèse de Tarbes, au profit du trésor royal épuisé. Avec l'accord du pape Paul IV, les prélats commendataires sont mis à contribution et Paul Portis, Prieur de Saint-Lézer, est chargé de se débarasser des biens "moins utiles et profitables au prieuré" pour la somme de 1914 livres tournois.

 

Les biens choisis par le Prieur pour être aliénés sont les fiefs de Juillan, Aurensan, Sarniguet et Vic-en-Bigorre, les lods et ventes de La Serre, le terroir noble de la Dieuzeide et les fiefs de la Navarrerie et Les Marties à Saint-Lézer, ceux de Romberte à Vidouze, le logement de Vic-en-Bigorre attenant à l'église Saint-Martin, la borde d'Aurensan, d'autres encore. Le terroir de la Dieuzeide mentionné confronte d'orient avec "le terroir et vignoble appelé la Côte d'arré, le grand chemin tirant droit à Montaner faisant division des terroirs, un ruisseau appelé le Bergon, d'occident avec Sanous, de midi avec le terroir de Saint-Lézer, le bois de Taravère et en partie avec le lieu appelé Casteyde et de septentrion avec le Temps Darré appartenant à Vic".

La déclaration des biens claustraux est annoncée le 19 juin 1565 par le trompette Bernard de Vic-en-Bigorre et a lieu le 23 juin en présence de Jean Petrabonna, vicaire et procureur du Prieur de Saint-Lézer, des rentiers de fiefs faisant office de témoins pour l'estimation des biens, Raymond Plantis, juge, Philippe Duclos et Dominique Dandrest, avocats à la cour vicquoise, Menyo Dupont, bayle et autres curieux. On décide que ces biens seront exposés en vente, criés, proclamés et "substantés" au plus offrant et dernier enchérisseur. De Cayret est chargé de transmettre au crieur le programme des encans. La deuxième séance a lieu le 27 octobre 1565, la troisième le 29 octobre, la quatrième le 31 octobre et la cinquième le 2 novembre. Y assistent : Pierre de Poitevin, syndic, Jean de Maubec, garde, acquéreurs pour la communauté vicquoise pour la somme de 250 livres, Nicolas de Lamanettre, prêtre, Jeannot du Soleil et Arnauton Dumas, tous de Vic-en-Bigorre. Les 250 livres sont payées à Arnaud Lacaze, Juge mage de Bigorre dans les monnaies suivantes : 83 écus blancs, 2 réaux, 1/2 réal, 2 sols Jacquès.

 

Le 27 novembre, Vic-en-Bigorre est mis en possession des fiefs. Jean de Florence, seigneur du lieu et Géraud Gaussinet assistent à la cérémonie. En signe de possession, les armes et panonceaux royaux sont apposés le 28 novembre par Menjon Dupont, bayle, Jehan Duclos, Consul de Saint-Lézer, Pierre Dupont, Jean Lacontre d'Arras et Guillaume Darribère de Tarbes (7).

 

Passées les guerres de religion et celles de la Ligue, les religieux de Saint-Lézer veulent recouvrer les biens aliénés en 1565. C'est le 26 septembre 1676 que Jean de Cabrerolles de Villepassans, prieur de Saint-Lézer, offre 250 Livres tournois en rachat des fiefs de la Dieuzeide, La Serre, La Navarrerrie et les Marties.

 

Le 29 septembre, les envoyés vicquois refusent l'offre. Le Prieur adresse une supplique au Sénéchal de Bigorre et, le 3 octobre 1699, vingt-trois ans après, le Roi signifie l'obligation de rendre les fiefs au monastère à Jean Lataste, Consul de Vic-en-Bigorre. On pourrait croire à un retour définitif de la Dieuzeide dans le giron monacal. Il n'en est rien. Le "Dénombrement" de la ville de Vic-en-Bigorre, rédigé à Pau, le 18 septembre 1727, et collationné le 6 juin 1733 par Tonon, rappelle dans son article m que la seigneurie de la Dieuzeide, acquise le 2 novembre 1565 englobant les fiefs de La Serre, La Navarrerie et Les Marties (8), demeure vicquoise; elle est repertoriée au sixième rang des possessions de la communauté.

 

Monsieur de Sault donne acte au Syndic de Vic-en-Bigorre de sa remise de déclaration et ordonne la publication de l'arrêt d'audience au lieu de Saint-Lézer les 19, 26 octobre et 9 novembre 1727 et à Vic-en-Bigorre les 7, 14 et 21 décembre suivants. Ces détails sont donnés par l'arrêt de vérification du "dénombrement", extrait des registres du Parlement de Navarre, du 12 mars 1732 (9). Ce dernier document précise le maintien du Syndic et de la communauté de Vic-en-Bigorre dans leur possession et jouissance des seigneuries de Ganos, Saubanha et Dieuzeide comprises dans le troisième article à la charge de la dite communauté de fournir au Roi un "Homme Vivant, Mourant et Confiscant" (10).

 

Notes :

 

(7) DD5 - Archives communales de Vic-en-Bigorre - Cahier du 3/03/1563 au 29/11/1565. Collationné sur l'original trouvé aux archives de Vic-en-Bigorre par Raymond Abbadie, représentant du Roi. Fait à l’Hôtel de Ville de Vic-en-Bigorre, le 21/12/1572.

 

(8) Glanages de Larcher - Tome IV - Page 395 - Confrontations Les Marties.

 

(9) Glanages de larcher - Tome IV - Pages 41~417-418-419-420-421.

 

(10) "Saubanha, une seigneurie particulière" - Claude Larronde - Pages 145-146.

 

"L'homme Vivant Mourant et Confiscant" est une personne choisie par les gens de "mainmorte", et agréée par le seigneur (ici le Roi), qui devient en quelque sorte le vassal officiel.

 

Communication aux "Premières Chroniques Vicquoises" du 11/12/1990.