L'eau canalisée
Appelé de Pujo (la commune), de Mme de Pujo, de la ville, la “gau” a servi, pendant des siècles, à l'irrigation des prés. Au début du XXème siècle, on peut estimer à 20 hectares, environ, la surface des prés arrosés. Force hydraulique pour les moulins, l'eau canalisée arrivant au moulin du Claquet permet d'actionner une turbine, grosse pompe centrifuge développant 50 chevaux-vapeur, dans la première usine électrique du département, en décembre 1891.
Au bout des huit pylônes à croisillons plantés sur les places du Sendreix et Gambetta, brillent les premières lampes à arc de l'éclairage urbain fabriquées chez Fabius Henrion, à Nancy. Comme il a fallu creuser plus profondément le canal de fuite, l'eau manque bien au centre ville, mais le plaisir d'être éclairé la nuit est sans égal !
Moyen pour l'hygiène publique, cette eau alimente les lavoirs et abreuvoirs placés sur son passage, sert à l'arrosage des rues et des places et contribue à la “fraîcheur de la Cité”. Plus tard, en juillet 1922, elle coulera dans douze cabines des premiers bains-douches municipaux. Moyen de l’hygiène privée aussi, elle nettoie les rigoles des quartiers de la ville et tient lieu de tout-à-l'égout pour la plupart des particuliers. Moyen pour la sécurité enfin, surtout à partir de 1800, le canal est un allié puissant pour combattre les incendies.
Et aujourd'hui ? Vestige primordial de notre patrimoine, c'est l'ornement de la ville que les municipalités qui se sont succédées ont eu le souci de restaurer par l'engagement de travaux importants.
Le canal de la Ville
Un moulin pour un pont neuf
Le 10 décembre 1645, il est décidé de construire un pont sur l'Echez “entre les deux qui sont à présent, que l'embouchure et bout du pont allât à l'entrée du château et que ledit pont fut fait avec des grandes pierres, pour les fondements, tuiles en arcades, pavé, etc.”. Le 10 juin 1646, la décision est confirmée.
Ce nouveau pont qui fait un angle de 20 degrés aval avec l'ancien, au moment de sa construction, de 1851 à 1853, ne sera pas réalisé, alors. Dans le prolongement axial de la rue du Château, le vieux pont a des piliers en briques, chaux et sable et une passerelle en bois pour le passage des piétons. Les attelages et autres charrois passent à gué, sur les grèves, un peu plus bas. Mais, l'absence d'une culée, à l'ouest, constitue la faiblesse congénitale de l'ouvrage. A chaque crue sérieuse, c'est-à-dire une année sur deux, en moyenne, le pont s'effondre.
Pressenti pour le bâtir, l'architecte-entrepreneur, Jean Saint-Girons, estime qu'il faut dix années de travaux pour mener le chantier à son terme. Six à sept mille livres de coût lui semble tout à fait probable.
La Ville n'a pas d'argent. Déjà lourdement endettée de 80000 livres pour le logement des gens de guerre, elle doit faire face à une augmentation sensible de la Taille et autres “subsistances”. L'architecte propose alors de construire un “moulin à farine” dont le revenu permettrait le remboursement d'une partie des frais de construction. La Bésiau accepte la proposition et adresse une supplique à Sa Majesté Louis XIV pour qu'elle accepte ce projet.
Pour 15 livres tournoises de fief annuel, Sa Majesté accepte. Plus, elle n'exige aucun droit de “pontonnage”. Le Monarque, en la personne de son représentant, voit loin. Ne facilite-t-il pas ainsi la circulation des paysans d'Armagnac, Rivière-Basse, Astarac et Pardiac qui pourront vendre leur blé aux Béarnais et payer ainsi plus facilement la Taille ? Cette décision royale est capitale pour l'essor économique de la ville. Mais en attendant les dividendes à venir, il faut construire le canal.
Un ouvrage rondement mené
Un canal c'est, tout d'abord, une prise d’eau. On achète une pièce de terre sur les terrains de monsieur de Monde, notaire royal, qui se fait tirer l'oreille pour vendre, avant d'y consentir afin “d'empêcher un procès et construire un nouveau canal, du côté de midi du Pont-Dessus de la rivière de l'Echez, pour rendre le canal à droite ligne et éviter de grands dégâts”. Et puis un barrage est construit à la “Préchère”.
Jean-Pierre de Monde, très coopératif, accepte de surveiller les travaux et de faire creuser le canal, aux frais de la ville, par les personnes de son choix. Il leur sera donné 14 sols par canne creusée (1) et pour les “estaques” des “plaisselles” un consul ira marquer un chêne à cet effet. L'avance du paiement des frais est assuré par le notaire.
Commencé dans les premiers jours de septembre, le creusement du canal s'achève en novembre 1659 et l'approbation des travaux et du coût global est donnée le mois suivant.