L'HOTEL DE JOURNET

Cet hôtel particulier est bâti en 1770 par Clément Xavier de Pujo, né à Pau, en 1715, seigneur des terres de Lafitole, Bordun, La Mothe et Espagnette érigées par lettres patentes du roi Louis XV, tente-cinq années plus tôt, en marquisat de Lafitole.

Il fallait être fort riche pour bâtir une résidence aussi considérable. Il l’est, le baron de Castelvielh et marquis de Lafitole. Marié à Catherine de Doat, une puissante famille de la vicomté de Béarn, il est à son décès, en janvier 1776, Président à mortier du Parlement de Navarre, charge cédée par son beau-père, messire Jean de Doat, Conseiller du roi Louis XVI et Lieutenant général et Juge mage à la sénéchaussée de Bigorre.

 

Son fils, Ambroise de Pujo de Lafitole vend ce bien, le 19 avril 1789 (Roger, notaire à Vic), à Françoise Louise Marie de Pasquier de Franclieu, veuve de Louis de Journet, Intendant de la Généralité d’Auch et successeur du célèbre chevalier et baron Antoine Mégret d’Etigny. La ville de Vic envoyait ses félicitations à «Monseigneur l’Intendant» pour son mariage, le 13 septembre 1773. L’Intendant de Journet se suicida, semble-t-il, le 30 décembre 1775, à Pau, où il était venu rétablir le Parlement.

 

Pendant la période révolutionnaire, Mme de Journet tient salon pour les aristocrates locaux qui font de la résistance aux idées nouvelles. Elle se fait remarquer par son besoin exacerbé d’exalter le sentiment monarchiste et c’est, peut-être, à ce comportement franchement hostile aux révolutionnaires vicquois que son patronyme est passé, sans coup férir, à la postérité. À chaque annonce d’un revers militaire de la République, elle organise pour ses amis, une soirée brillamment éclairée, où l’on clame des pamphlets antirévolutionnaires et revanchards qui couvrent les vigoureux «Ah çà ira» entonnés, à l’extérieur, par les partisans de la «Société Populaire». Elle figurera sur la liste des 43 suspectes assignées à résidence, dans leur propre demeure.

 

Le 14 juillet 1832, elle apporte en dot à sa nièce Marie-Charlotte Pasquier de Franclieu, sa maison de Vic-en-Bigorre, en s’en réservant l’usufruit. Mme de Journet décède, le 5 février 1838. Elle aura survécu 62 ans à son mari.

 

Le marquis de Franclieu, mari de Mme de Journet, n’habite pas dans son hôtel. Il demeure dans son château de Lascazères. En 1848, la «maison Franclieu» est louée à Masclet, pour 500 francs par an. Le 15 décembre, la ville reçoit, en garnison, une compagnie d’infanterie. Pour la loger, on sous-loue précipitamment, au prix de 300 F, une partie de l’immeuble. Le bail de Masclet arrive à expiration, en décembre 1849. Il offre 600 F par an pour le renouveler mais le marquis de Franclieu donne la préférence à la Ville, en juillet 1849, avec l’espoir de lui vendre l’hôtel.

Le 3 août 1849, le Conseil municipal vote le principe de cet achat pour le prix de 15000 F, en trois annuités (qui feraient 450000 F de 1984, selon l'historien Joseph Verley). Le motif de l’achat est le logement de la garnison que l’on est assuré de garder. Louis Dominique Ponsan, maire de Vic-en-Bigorre, déclare : «Cette maison me paraît assez vaste pour loger deux compagnies». En novembre 1851, les militaires sont déjà partis. Le 7 août 1858, le nouveau maire Camille Daros propose au Conseil le transfert de l’Hospice dans l’hôtel de Journet et 10000 F sont votés pour les réparations. 

 

Malgré la mauvaise volonté du Préfet qui refuse l’autorisation de déplacement car il juge l’immeuble bien trop grand, le Conseil municipal insiste et, le 5 août 1861, l’Hospice s’installe dans ses nouveaux locaux. Depuis, la «maison Journet» est toujours considérée comme une propriété communale.