Chroniques n° 39 et n° 40 - 8 et 15 avril 2008

Bagnères rivale de Spa !

 

En 1818, Henri Beraldi a gardé de Bagnères un souvenir ébloui. Arrivé en calèche, il descend au «Grand Soleil» où la salle est élégante, le dîner splendide et le vin de Madiran délicieux. C'est le lieu de France où l'on s'amuse le mieux et les médecins de la cité thermale «qui n'ont garde d'abolir des habitudes qui se concertent si bien avec leur plan» préconisent danses, promenades et amusements variés: acrobates, funambules, aéronautes, artistes et jongleurs de toutes espèces. Les jeunes gens de la Ville sont «des élégants de grandes cités», les femmes «de petites maîtresses maniérées connaissant tout l'avantage que leur donnent la fraîcheur de leur teint et la régularité de leurs traits». Église, Vigneaux, Coustous, cabinet littéraire de M. Jalon décoré de tableaux des plus beaux sites des Pyrénées, bonne chère, et, pour les colifichets, le bazar des marchands installés pour la saison y pourvoira. Le dimanche, en montant aux bains de la Reine, vous entendrez une musique champêtre et y verrez «des danseurs vigoureux se trémoussant avec de fraîches Bagnéraises». Cependant, le temple de la Fortune l'intrigue au plus haut point: «On vient pour hasarder sur une carte les économies de l'année. C'est l'antre de Cacus!».

Autel votif d'Abellios à Saint-Aventin - 31

Montagnards craignez Abellios !

 

Le Pic du Midi de Bigorre est un site astronomique de premier plan et un cadran solaire naturel. Cette horloge géologique permet à toute la vallée de l'Adour, à partir de Bagnères et loin, vers la plaine, de repérer le midi, nous affirme l'astronome Jean-Christophe Sanchez. Dans le monde rural, le Pic a servi d'horloge jusqu'à la démocratisation et l'adoption d'une heure uniforme sur tout le territoire. Le culte solaire était pratiqué depuis fort longtemps autour de cette montagne. Ainsi, dans la vallée de Lesponne, non loin du pic de Montaigu, une croix de pierre, dite de Béliou, se dresse face au Pic. Les populations locales vouaient un culte solaire au dieu Abellios qui s'est christianisé en Beliou. Sur la face de la croix, on aperçoit une figure humaine, bouche bée, reposant sur un monticule de pierres, qui semble être votif, tournant le dos au Pic. Pour l'astronome, ce monument aurait été à l'origine un disque solaire en l'honneur du dieu celtibère Abellios. La croix aurait été taillée postérieurement et la face serait celle du Christ. Les légendes locales racontent que celui qui ne respecte pas la croix, ou la déplace, déclenche l'orage, comme tous ceux qui ne vénéraient pas Abellios.